Ils ne sont ni hôteliers, ni promoteurs, ni architectes. Juste deux entrepreneurs en quête d’un projet plus concret, plus "terre à terre". 

Leur pari : transformer une friche oubliée de 24 hectares, envahie par la végétation, en un hôtel haute gamme alliant nature, convivialité et séminaires d’entreprise. 

Entre ambition économique, diplomatie locale et respect du vivant, l’histoire du Domaine du Sausseron est celle d’une aventure à la frontière du rêve et de la persévérance — un projet de 30 millions d’euros qui prouve qu’avec du courage, on peut bâtir bien plus qu’un hôtel.

Un pari entre hôtellerie et biodiversité

Leur idée ? Transformer ce site abandonné depuis 2004 en un lieu hybride, à la fois destination de loisirs et centre de séminaires d’entreprise.
Un modèle pensé pour en profiter pleinement à chaque saison, capable de séduire les urbains en mal de nature comme les cadres en quête de cohésion d’équipe.

“Ce qui nous a marqués au premier abord, c’est la verdure. En vingt ans d’abandon, la nature avait repris ses droits… et cette ambiance sauvage et isolée, nous l’avons adorée. Pas un chat autour. Ce terrain nous a donné envie de créer un lieu qui respire, pas juste un hôtel de plus. Quelque chose entre la cabane et le confort haut de gamme”, raconte Romain, l’un des fondateurs.

Avant de se lancer, ils ont fait leurs devoirs : une étude de marché solide a confirmé la forte demande autour de Paris et la hausse des prix post-Covid. De plus, le parc naturel du Vexin offre une multitude d’activités qui attirent les visiteurs. De quoi rassurer leurs premiers investisseurs et pousser le projet plus loin. La première levée de fonds a ainsi permis de réunir 650 000 €, nécessaires aux études de faisabilité.

Trois communes, trois PLU, une montagne administrative

Mais avant de poser la première pierre, il a fallu franchir un mur invisible : celui des démarches administratives. 

Le terrain s’étend sur trois communes, chacune avec ses propres réglementations d’urbanisme. Incompatibles, évidemment.
Pour débloquer la situation, les fondateurs ont dû obtenir la reconnaissance d’un intérêt général et mener une procédure de déclaration de projet simultanée sur les trois territoires.

“C’est un peu comme jouer à Tetris administratif”, plaisante Mathias, le second fondateur. “Sauf que chaque pièce est vivante, et parfois en désaccord. Mais nous avons vite compris que la transparence serait notre atout majeur. Ce projet n’est pas simplement un énième hôtel pour nous, c’est un projet de cœur. Nous devons le co-construire avec les riverains et les autorités locales, les rassurer, répondre à leurs interrogations et tout faire pour l’inscrire durablement dans la région.”

Leur travail de concertation politique a été exigeant. Au départ, certains maires redoutaient “un projet trop parisien”. Les entrepreneurs ont alors multiplié les rencontres, cherchant à comprendre et à intégrer les besoins du territoire : sécurité, retombées économiques locales, réhabilitation d’une friche. Petit à petit, la confiance s’est installée.

Convaincre les élus, mais aussi les chouettes

À cela s’ajoutent les contraintes environnementales : zones humides, nappe phréatique affleurante, faune protégée.
Une étude - parmi tant d’autres - menée sur quatre saisons a recensé la biodiversité du site, jusqu’à la petite chouette effraie, espèce à fort enjeu de conservation.

“On a appris à construire avec la nature. C’est une école de patience et d’humilité”, confie Romain. “Malgré le caractère initialement contraignant de l'étude, nous voyons cette démarche comme une force : elle nous permettra de montrer à nos futurs clients la richesse de la biodiversité du site.”

Cette approche a aussi permis de mieux penser l’aménagement du terrain en amont, d’éviter les problèmes structurels et de prévoir des espaces dédiés aux espèces présentes- qui deviendront, sans nul doute, les futures stars de l'hôtel ! 

L'architecte des Bâtiments de France, allié inattendu

Autre prouesse : avoir obtenu le feu vert de l’Architecte des Bâtiments de France (ABF), souvent redouté par les porteurs de projets. En adoptant une stratégie de concertation très précoce et proactive, les fondateurs ont transformé une contrainte en collaboration. Résultat : une architecture contemporaine et respectueuse du site, mêlant architecture typique vexinoise en longère et tuiles plates mais avec d’autres bâtiments en bardage bois et coques métalliques.

L’intégration dès le départ d’autres organismes instructeurs, comme le Parc naturel du Vexin, l’autorité environnementale ou les services de sécurité, a également porté ses fruits pour l’obtention des autorisations nécessaires à l’avancement du projet.

Dix leçons d’un projet pas comme les autres

1. Rêver grand, mais rester ancré. Leur idée d’un hôtel hybride, entre nature et séminaires, comble un vide réel sur le marché francilien.
   
   

2. Faire ses devoirs. Des études sérieuses valent mieux qu’un simple feeling. Près de vingt-cinq études ont été menées : stratégiques, urbanistiques, techniques, environnementales et paysagères.
   
   

3. Accepter la lenteur. Modifier trois PLU à la fois, c’est au moins deux ans de procédures.
   
   

4. Écouter les territoires. Ce sont les élus, mais aussi les riverains, qui ouvrent (ou ferment) les portes.
   
   

5. Penser ancrage, vraiment. Le projet a évolué avec son environnement, sa biodiversité, pas contre eux.
   
   

6. Identifier les acteurs clés pour anticiper les blocages. Consulter les institutions instructrices tôt peut faire gagner des années.
   
   

7. Adapter sans renoncer. Une nappe phréatique trop proche ? On revoit les plans, on avance.
   
   

8. Structurer le financement intelligemment. Séparer murs et fonds de commerce attire plus d’investisseurs dans ce cas de figure.
   
   

9. Donner du sens à l’histoire. Le passé du lieu crée un lien émotionnel fort avec le public.
   
   

10. Se jeter à l’eau sans savoir nager. Ne pas être du métier, c’est parfois ce qui permet d’inventer autrement.

Aujourd’hui, le Domaine du Sausseron arrive à la fin de sa phase d’études et s’apprête à lever les fonds nécessaires à la construction. Si vous souhaitez vous joindre à l’aventure c’est encore possible, mieux vaut en parler directement à Mathias et Romain.

Mais au-delà des chiffres, cette aventure raconte surtout la puissance de l’audace et de l’intuition. Parce qu’en 2025, on peut encore trouver un bout de rêve dans une friche - à condition d’y regarder autrement.