Jean-Gabriel Guillet (E11) : « Les cryptomonnaies vont restructurer nos économies »
Jean-Gabriel Guillet (E11) a mené l’enquête pendant 3 ans pour réaliser le documentaire Cryptomonnaies : mon incroyable odyssée, disponible à partir du 13 mars sur MyCanal et Canal+Docs. Il nous livre les résultats de ses investigations.
ESSEC Alumni : Comment en êtes-vous venu à réaliser un documentaire sur les cryptomonnaies ?
Jean-Gabriel Guillet : Ancien trader, je me suis lancé dans l’art narratif sous différents formats (romans, stand-up, médias…) à partir de 2016. Puis, pendant le confinement, j’ai développé une fascination pour le monde fou des cryptomonnaies : parti d’une poignée d’aventuriers, le marché attire aujourd’hui plusieurs centaines de millions d’investisseurs !
EA : Comment traitez-vous ce sujet ?
J.-G. Guillet : Il s’agit d’un documentaire « gonzo », c’est-à-dire incarné, où l’on suit un jeune trader qui part à la conquête des monnaies digitales en rencontrant tous les grands acteurs du milieu : Vitalik Buterin, le créateur d’Ethereum ; CZ, l’ex-patron du géant Binance ; Michael Saylor, le roi du Bitcoin… Un périple à travers 8 pays, fruit d’un travail de 3 ans avec une importante équipe.
EA : Pour les novices, pouvez-vous rappeler le fonctionnement des cryptomonnaies ?
J.-G. Guillet : Les cryptomonnaies sont des monnaies digitales qui ne dépendent ni des banques, ni des États, ni d’aucun tiers centralisateur. Elles reposent sur la technologie de la blockchain et sont sécurisées par des systèmes de codes cryptographiques. Bref, elles se présentent comme l’argent du futur…
EA : Où en est le développement du secteur ?
J.-G. Guillet : En plein expansion jusqu’en 2023, le secteur a été ralenti récemment par un krach ainsi que par la raréfaction plus globale des financements des start-up. Mais les cours remontent déjà sensiblement et les investissements dans le Web3, très lié aux cryptomonnaies, reprend des couleurs.
EA : Quels enjeux des cryptomonnaies questionnez-vous dans votre documentaire ?
J.-G. Guillet : Primo, un enjeu politique : peut-on fonctionner avec de l’argent qui ne dépend plus des États ? Deuxio, un enjeu social : peut-on suivre à la trace ces nouvelles « communautés cryptos » ? Tertio, un enjeu économique : peut-on faire fortune dans ce domaine ?
EA : Le sujet est relativement technique. Comment le rendez-vous accessible au grand public ?
J.-G. Guillet : Nous donnons la parole à des intervenants de tous horizons – des entrepreneurs, des inventeurs, des influenceurs, des journalistes, des politiques mais aussi des « scammers » ou des utilisateurs « lambda » – et nous recourons à des métaphores avec des images, à des motion design, même à de l’intelligence artificielle… Mais c’est surtout le style « gonzo » qui permet de mettre le sujet à la bonne hauteur : on suit une aventure personnelle, la petite histoire dans la grande. C’est à la fois plus prenant et plus divertissant.
EA : Vous avez rencontré des « fervents adorateurs » comme des « virulents détracteurs » des cryptomonnaies. Comment expliquez-vous la polarisation des opinions sur ce sujet ?
J.-G. Guillet : L’argent constitue un élément structurant de la société. D’un côté, les États veulent le protéger à tout prix – c’est le cas de le dire ! De l’autre, certains individus pensent pouvoir reprendre leur liberté financière grâce à des monnaies qui ne dépendent plus des pouvoirs traditionnels – pour l’heure du moins, car on voit aussi émerger des monnaies numériques contrôlées par les banques centrales. Quoi qu’il en soit, vue sous cet angle, la question s’avère éminemment politique, donc clivante. Et je pense que la tendance va s’accentuer.
EA : En définitive, quelles conclusions tirez-vous de vos investigations sur les cryptomonnaies ?
J.-G. Guillet : Comme pour l’intelligence artificielle, la biologie synthétique ou l’informatique quantique, les cryptomonnaies me sont apparues bien plus surprenantes et disruptives que je l’imaginais au premier abord. Et le monde commence à s’en rendre compte : l’hyper-évolution planétaire du secteur prend des airs de vague déferlante. Je pense que nous ne sommes qu’au début d’une révolution qui va restructurer de nombreux pans de nos économies.
Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni
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