Back to news
Next article
Previous article

Samuel Loiseau (E98) : « Le modèle français du cinéma est un modèle gagnant »

Interviews

-

05.21.2025

Désolé, ce contenu n'est pas disponible en English

Le marché des salles de cinéma a grandement souffert du COVID-19 et traverse une crise structurelle partout dans le monde. Sauf en France, où l’exception culturelle fait pleinement son œuvre… Explications de Samuel Loiseau (E98), directeur général des opérations cinémas France et Belgique chez UGC.

ESSEC Alumni : Comment les activités d’UGC se portent-elles ? 

Samuel Loiseau : UGC compte parmi les principaux acteurs de l’industrie du cinéma en Europe avec 48 cinémas et 510 salles en France, dont UGC Ciné Cité Les Halles à Paris (1er au monde en termes de fréquentation), ainsi que 7 cinémas et 74 salles en Belgique. Mais ce n’est pas tout : comme très peu de sociétés du secteur, UGC s’impose aussi dans le domaine de la création cinématographique avec son activité de production et de distribution dont le catalogue affiche des comédies populaires comme Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? de Philippe de Chauveron (7e succès français de tous les temps) aussi bien que des films d’auteurs comme Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet ou De battre mon cœur s’est arrêté et Dheepan de Jacques Audiard, respectivement récompensés par 4 Césars et par la Palme d’Or. Sans oublier des œuvres audiovisuelles pour la quasi-totalité des diffuseurs et plateformes en France (TF1, France 2, Arte, Canal +, Netflix, Disney+…) : dernier succès en date, la série HPI accumule les records historiques d’audience en France – jusqu’à 10 millions de téléspectateurs en direct et plus de 2 millions de vues en replay J+7 pour chaque épisode.

EA : Quel état des lieux du marché des salles de cinéma peut-on dresser en France ? 

S. Loiseau : Rappelons que la France a inventé le cinéma il y a 130 ans… Un héritage historique qui a laissé des traces : notre pays abrite le premier parc de salles de cinéma en Europe par son nombre (2 054 cinémas regroupant 6 300 salles) et sa densité (chacun de nos concitoyens habite à moins de 20 minutes d’un cinéma ou d’un point de tournée de circuit itinérant). La fréquentation des salles reste aussi la première d’Europe avec constance depuis plus de 20 ans, largement devant nos voisins : on dénombrait 181,2 millions d’entrées en 2024. Cette performance nous place plus largement dans le top 5 mondial, ce qui n’est pas donné à beaucoup de nos secteurs économiques… Autre spécificité : les films français prennent plus de 45 % des parts de marché, soit deux fois plus que les films allemands, italiens ou espagnol sur leurs propres territoires. À cet égard, notons également que les films français, contrairement aux films étrangers, ont retrouvé leur niveau de fréquentation d’avant la crise du COVID-19, en particulier grâce à Un p’tit truc en plus (11 millions d’entrées) et Le Comte de Monte-Cristo (9,5 millions d’entrées). Notre modèle est véritablement un modèle gagnant !  

EA : Comment expliquer cette résilience ? 

S. Loiseau : L’industrie du cinéma en France bénéficie d’investissements constants depuis 30 ans. Les entreprises d’exploitation cinématographiques ont su moderniser de façon régulière les cinémas tant en termes de confort et de technique qu’en termes marketing : diversité tarifaire, cartes illimitées… Ajoutons à l’équation notre dispositif incitatif de réinvestissement financé par des taxes affectées : concrètement, les spectateurs des différents diffuseurs du film (salles, TV, plateforme, vidéo) contribuent à financer les nouveaux films et les salles de cinéma. Sans oublier le cadre réglementaire d’obligation d’investissement dans les films français et européens des TV et des plateformes, ainsi que le dispositif de chronologie des médias. 

EA : Quels facteurs sont-ils susceptibles de jouer sur l’évolution du secteur dans un futur proche ?

S. Loiseau : Si notre cinéma domestique occupe une part de marché importante, nous constituons aussi l’un des trois principaux marchés mondiaux pour les films américains, largement devant les autres pays européens. Or la grève des scénaristes et des acteurs en 2023 à Hollywood a affecté durablement l’offre… Le retour à une densité « pré-COVID» me paraît le facteur principal d’évolution du marché à court terme.

EA : Dans ce contexte, quelle est la stratégie d’UGC ?  

S. Loiseau : Nous prévoyons notamment de renforcer notre éditorialisation, d’amplifier notre communication de marque-média, d’adapter nos parcours aux usages des clients et de développer la Carte UGC Illimité qui fête ses 25 ans cette année et qui symbolise notre engagement pour des tarifs de cinéma accessibles à tous les publics. Nous restons ainsi fidèle à notre raison d’être : « Transmettre la passion du cinéma et encourager la curiosité ».

EA : Plus largement, quelles actions vous paraîtraient-elles pertinentes pour maintenir la bonne santé du marché des salles de cinéma en France ? 

S. Loiseau : Notre modèle français est une richesse nationale qu’il faut en permanence chérir, adapter, moderniser afin que la régulation reste équitable et la plus proche possible de la réalité des enjeux industriels. Il s’agit d'un combat collectif et nécessaire pour garantir qu’une grande diversité d’œuvres continuent d’être produites et exposées dans les salles françaises.


Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni 

Vous avez aimé cet article ? Pour que nous puissions continuer à vous proposer des contenus sur les ESSEC et leurs actualités, cotisez à ESSEC Alumni.

Comments0

Please log in to see or add a comment

Suggested Articles

Interviews

Matthieu Delfini (E16) : « Après la finance, la peinture s’est imposée à moi »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

June 18

Interviews

Thomas Jobbé-Duval (E00) : « Les librairies font face à de nombreux défis »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

June 18

Interviews

Reflets Mag #157 | L’aventurière bipolaire

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

June 03